La pression monte pour pousser le Département de la sécurité et de l’économie (DSE) de Pierre Maudet à sévir plus lourdement face à Uber. Cette plate-forme informatique internationale, qui met en contact des chauffeurs et des passagers, est accusée par les taxis genevois de rafler le marché local, sans en respecter les règles.
Après les chauffeurs la semaine dernière, qui brandissaient la menace d’actions spectaculaires si l’Etat ne parvenait pas à ramener l’ordre, les associations professionnelles et les centrales montent au créneau. Dans un courrier recommandé envoyé le 2 avril au Conseil d’Etat, elles pressent l’administration de faire cesser l’activité d’Uber d’ici au 15 avril. Faute de quoi elles alerteront la Cour des comptes au sujet de «l’inaction et de la violation du droit». Pire: elles réclameront «à l’Etat de Genève la réparation du dommage que les exploitants de taxis subissent, ceux-ci s’organisant pour regrouper toutes leurs créances en dommages-intérêts au sein d’une entité unique de recouvrement». Selon ce courrier, il n’est pas acceptable «qu’une société entre dans un marché économique strictement régulé par la loi, tout en s’affranchissant de toutes règles légales» ni que «les autorités se contentent de faire l’aveu et la démonstration de leur impuissance».
Le montant reste à fixer
Quel montant pourrait-il être réclamé à l’Etat? «On ne peut pas formuler d’ordre de grandeur pour le moment, répond Me Guillaume Etier, l’un des conseils des centrales et associations de taxis. Mais on peut dire que c’est tout le bénéfice engrangé par Uber durant ses six mois d’activité à Genève. On ne peut pas imaginer qu’Uber véhicule une nouvelle clientèle. Ou, si tel est le cas, elle est marginale. La méthode n’est pas encore définie pour déterminer le dommage subi.»
Reste que les taxis ne sont pas dans la meilleure position juridique pour exiger des dommages et intérêts. Suite à leur action judiciaire sur le plan civil, la Cour de justice a estimé, le 27 février, que les requérants n’avaient pas «rendu vraisemblable» le dommage économique qu’ils auraient subi à cause de l’irruption d’Uber à Genève. Comment, dès lors, prétendre être dédommagé par l’Etat? «L’arrêt de la Cour de justice s’inscrit dans une logique judiciaire, répond Me Guillaume Etier. Lors de notre requête, en novembre, il était difficile de prouver ce dommage. Mais il est évident que l’arrivée d’un nouvel acteur prend des parts de marché. Il faudra peut-être établir un exercice comptable intermédiaire pour le prouver.»
Courriers croisés
La Cour de justice a en revanche jugé vraisemblable que les chauffeurs œuvrant pour Uber, ou du moins certains d’entre eux, bafouent les prescriptions légales. Uber, de son côté, dément toute irrégularité et a recouru contre toutes les sanctions infligées. Ces litiges ne sont aux dernières nouvelles pas tranchés, pas plus que les plaintes déposées à la suite d’incidents qui ont mis aux prises des chauffeurs traditionnels et d’autres travaillant avec Uber.
Au DSE, on indique que Pierre Maudet a justement écrit aux défenseurs des taxis traditionnels, le 2 avril, c’est-à-dire le jour même où la profession envoyait sa propre missive recommandée au Conseil d’Etat. «Les courriers ont dû se croiser, suppose Emmanuelle Lo Verso, au nom du département. Dans sa lettre, Pierre Maudet présente son plan d’action. Ses résultats feront prochainement l’objet d’une communication, en priorité aux représentants des taxis.»
Le DSE a mis sur pied mercredi dernier une cellule spéciale, dotée de six policiers, pour contrôler le respect des prescriptions légales et réglementaires par les chauffeurs travaillant pour Uber. Le Département a par ailleurs rappelé qu’il était tenu de réagir aux éventuelles infractions en respectant le principe de proportionnalité. (TDG)
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