lundi 28 mars 2011

Fin de la prise en charge des frais de transport pour les ALD ?

Fin de la prise en charge des frais de transport pour les ALD ?

Un décret publié le 10 mars 2011 modifie les conditions de prise en charge des frais de transport pour les malades reconnus atteints d’une affection de longue durée (ALD).
La prise en charge des dépenses de transport des personnes en ALD sera désormais réservée, à compter du vendredi 1er avril, aux patients "dont l'incapacité ou la déficience les empêche de se déplacer par leurs propres moyens".
Cette mesure s'inscrit dans le cadre des mesures d'économies annoncées par le gouvernement en septembre 2010. Les pouvoirs publics souhaitent réaliser 20 millions d'euros d'économies sur les dépenses de transports « injustifiées » de certains patients en ALD.
Quelques éclaircissements méritent cependant d’être apportés quant au périmètre d’application de ce texte.


Quels patients ?
Le décret concerne les patients en ALD, mais ne s’applique toutefois pas aux transports :
  • liés à une hospitalisation
  • de longue distance (plus de 150 kilomètres)
  • en série (au moins 4 transports de plus de 50 km sur une période de 2 mois)

Quels transports ?
Les moyens de transport pris en charge par l'assurance maladie sont répartis en trois catégories:
  • l'ambulance
  • le transport assis professionnalisé, le véhicule sanitaire léger (VSL) ou le taxi
  • les autres types de transports, comme les transports en commun, l'avion ou le bateau de ligne régulière et les véhicules individuels

L’incapacité ou la déficience : quelles définitions ?
Un référentiel de prescription (arrêté du 23/12/2006) précise "les situations dans lesquelles l'état du malade justifie respectivement la prescription des modes de transport prévus (...) en fonction de l'importance des déficiences et incapacités et de leurs incidences".
1. Le transport par ambulance peut être prescrit lorsque l'état de santé de la personne nécessite :
  • qu'elle soit allongée ou semi-assise
  • qu'elle soit surveillée par une personne qualifiée
  • qu'elle soit placée sous oxygène
  • si son état requiert "un transport avec brancardage ou portage ou un transport devant être réalisé dans des conditions d'asepsie".
2. Le transport assis professionnalisé (VSL, taxi…) peut être prescrit à :
  • un patient atteint physiquement requérant une aide au déplacement technique ou humaine "mais ne nécessitant ni brancardage ni portage"
  • un patient déficient intellectuel ou psychique requérant l'aide d'un accompagnant
  • un patient atteint d'une déficience "nécessitant le respect rigoureux des règles d'hygiène ou la prévention du risque infectieux par la désinfection rigoureuse du véhicule" 
  • un patient soumis à un traitement ou ayant une affection pouvant occasionner des risques d'effets secondaires pendant le transport.
3. Lorsqu'aucun des types de transport des deux premières catégories ne peut être prescrit, c'est la troisième catégorie (transport en commun, véhicule individuel…) qui doit être choisie.
A compter du 1er avril 2011, c’est donc cette dernière situation qui ne devrait donc logiquement plus donner lieu à aucun remboursement…
Rappelons que jusqu’ici, les déplacements en véhicule individuels étaient pris en charge sur la base d’indemnités kilométriques.

Concrètement, qu’est-ce que ce décret va changer ?
  • Vous avez une maladie rénale, une insuffisance rénale chronique, vous êtes dialysé(e) (ALD 19) ou vous êtes transplanté(e) (ALD 28) : 
Les transports nécessaires à vos soins, y compris pour les séances de dialyse (sauf si votre centre de dialyse est distant de plus de 50 km de votre domicile), ne seront remboursés que si vous justifiez d’une incapacité nécessitant le recours à une ambulance, à un VSL ou à un taxi.
Si vous vous déplacez en transport en commun ou si vous utilisez votre véhicule personnel, vous ne serez pas remboursé(e), sauf :
  • Si le déplacement est supérieur à 150 km
  • Pour vos séances de dialyse ou pour des soins (par exemple suivi post transplantation immédiat) nécessitant plus de 4 transports sur une période de deux mois, si vos déplacements sont supérieurs à 50 km. Vos déplacements seraient dans ce cas considérés comme des transports en série et leur prise en charge ne sera pas impactée.
Attention toutefois : pour l’Assurance Maladie, le principe de la plus stricte économie prévaut. La prise en charge intervient sur la base de la distance qui sépare le point de la prise en charge du malade, de la structure de soins prescrite appropriée la plus proche. Il faudra donc pouvoir justifier que vous ne pouvez recevoir des soins équivalents dans un lieu plus proche de votre domicile…
  • Rappel : niveau de prise en charge
Le décret ne modifie pas les autres motifs de prise en charge de transport, ni leur niveau, qui s'élève à 100% pour les patients qui sont exonérés du ticket modérateur, ce qui est le cas des patients en ALD.
Une franchise s'applique toutefois au remboursement des trajets effectués depuis le 1er janvier 2008. Son montant est de 2€ par trajet, dans la limite de 4€ par jour et par patient et de 50€ par année civile (ce plafond annuel inclut la franchise appliquée aux médicaments remboursables et aux actes effectués par des auxiliaires médicaux).



En conclusion
Cette mesure revient finalement à supprimer, ou en tout cas à limiter très fortement, les remboursements des frais de transports « autonomes » que sont les transports en commun ou le véhicule personnel. Or, il s’agit des modes de déplacement les plus économiques.
Dès lors, afin de ne pas pénaliser leurs patients les plus modestes, il est probable que de nombreux médecins seront amenés à leur prescrire des taxis ou des VSL, même lorsque leur état ne le nécessite pas, ce qui parait contre-productif par rapport à l’objectif d’économie affiché…
Par ailleurs, cette modification parait aller à l’encontre de l’égalité de traitement entre les personnes : en effet, les personnes habitant à distance d’une ville pourraient être amenés à renoncer à des soins compte tenu de l’impossibilité pour eux de se rendre à des consultations de spécialiste, car trop pauvres pour se déplacer fréquemment par leurs propres moyens et "trop autonomes" pour bénéficier d’un transport accompagné…
Les limites du dispositif n’ont pas échappé au conseil de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, qui s’est prononcé début janvier contre ce projet de décret.
De son côté, l'Union nationale des organismes complémentaires d'assurance maladie a "pris acte" dans une délibération du 2 février des modifications envisagées dans un projet de décret sensiblement différent du texte définitif, regrettant qu'elles n'aient pas donné lieu à une "refonte de l'ensemble de la prise en charge des frais de transport".
Le CISS (Collectif Interassociatif sur la Santé) avait quant à lui dénoncé dès janvier 2011 le projet de décret. Il y a donc fort à parier que sa publication ne restera pas lettre morte…

Source

2 commentaires:

  1. Choisi comme date le 1er AVRIL c'est un poison clown!

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  2. http://www.mesopinions.com/NON-au-nouveau-decret-sur-le-transport-des-Affections-Longue-Duree-petition-petitions-ce0e6a6aecb895ed1f41be50724899d1.html

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