mardi 15 mars 2011

Carburant : transporteurs et taxis catastrophés

Rien de tel que quelques centimes de plus toutes les semaines à la pompe pour gripper le moteur du transport routier. Mais pas seulement. Taxis et autres activités sont menacés.

Hier matin, encore, la livraison de carburant des transports Reviron a pris quelques centimes de plus. Pour atteindre 1,37 ?\l (TTC), ceci malgré les prix négociés à la cuve auprès des fournisseurs.

« Je pense que l'on n'a jamais atteint ce prix-là. Même pas en 2008 ! », se désole le comptable de l'entreprise, Éric Masseret. Le seul moteur qui tourne sans compter, c'est celui... de sa calculette. « On a dû prendre à peu près 40 centimes du litre en un an. On en est à 26 ou 27 % de hausse depuis juillet ! »

Pour l'entreprise de transports nationaux basée à Magnet, la situation est, au choix, « alarmante » si l'on se réfère à la seule envolée du carburant, « dramatique » si l'on reprend le contexte de difficultés générales sur lequel se greffe la flambée du gasoil.

C'est en tout cas ce qu'explique Alain Reviron. Le président de la société décrit une activité « laminée ». « Aujourd'hui, on est en concurrence avec des pays "low cost" du transport. Ceux de l'Est ne travaillent plus seulement au niveau international : ils prennent aussi des marchés nationaux, notamment avec le cabotage pratiqué du côté des grandes enseignes. »

Alors dans ce tableau, les 27 % d'augmentation depuis juillet : « C'est la cerise dans le moteur ; celle qui risque de tout faire exploser. Il y a beaucoup d'entreprises qui vont disparaître. »

Les transports Reviron et leur flotte de 55 véhicules n'en sont pas là. Mais l'entrepreneur a déjà dû réduire la voilure : en juillet 2010 il avait encore 75 camions.

D'une manière générale, la hausse est d'autant plus douloureuse pour les transporteurs indépendants qu'ils ne parviennent pas à la répercuter en pied de facture ; pas même à la hauteur de l'indice autorisé par l'État.

Même en relevant ses tarifs a minima, Alain Reviron assure avoir déjà perdu des clients, pénalisés eux-mêmes dans leur activité de production par la hausse du carburant.

Pour les taxis, comme pour les petits transporteurs qui travaillent avec les sociétés d'affrètement, la situation est un peu moins grave à ce jour. Mais elle n'est pas moins alarmante pour l'économie générale.

Anne-Marie Danjean, patronne des transports Ventura (Hauterive), explique que ses trois chauffeurs « tâchent de réduire les frais par tous les moyens ».

Modes de conduite plus économiques, temps de coupures scrupuleusement décomptés sur les horaires travaillés, préférence accordée aux routes plutôt qu'aux autoroutes, et changement de culture dans l'approvisionnement. « Aujourd'hui, je suis condamnée à aller faire le plein des camions dans les supermarchés où l'essence est moins chère. »

Même aveu, sur l'air amer des regrets, dans les sociétés de taxi. « L'augmentation de nos prix ne correspond pas à l'augmentation du prix réel de l'essence. Alors on fait comme tout le monde : on va au moins cher. Il y a encore deux semaines, on tâchait de privilégier la qualité de l'essence ; tant pis pour nos moteurs... », avoue Julien, chauffeur chez Tubello (Vichy).

« Qu'est-ce que vous voulez faire ? Avec deux pleins par semaine, la hausse des charges liées au seul carburant s'élève à 100 ? par mois. Nous, on ne peut pas la répercuter », résume Thierry Marest, cogérant des Taxis de Vichy. Certains, dans la profession, commencent même à changer de voiture, en privilégiant les petites cylindrées aux confortables berlines qui étaient plutôt la norme.

« Ce qui est dramatique c'est que cela s'ajoute à d'autres problèmes, comme l'obligation qui nous est faite d'investir dans un nouveau matériel et la fin d'une détaxe ».

Là encore, la hausse du carburant vient plomber une situation déjà tendue. Et l'on voit se profiler des évolutions qui risquent de toucher d'autres activités par ricochet.

Anne Bourges

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